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vendredi 28 novembre 2014

Lucas

© 2014 François Guyon & Meghane Schevènement
7 août 2014

Lucas est né en 1981 ; il a grandi à Montbéliard, mais habite à Besançon depuis plus d'une dizaine d'année. Membre fondateur de l'association Mighty Worm, il en est l'actuel président. Cette interview est évidemment à lire tout en écoutant la rediffusion de l'émission à laquelle Lucas participe depuis 7 ans : le Mighty Worm Radio Show.

"Ton premier souvenir de concert ?  

C’était forcément à l’atelier des Môles de Montbéliard. Ça devait être une soirée organisée par des copines de collège pour financer une sortie en Allemagne, on devait avoir 14 ans. Elles connaissaient des types plus âgés, un groupe de lycée, des mecs de 17 ans qui jouaient du rock et roulaient en mobylettes. On s’est tous retrouvés à l’atelier des Môles à un âge où normalement tu ne vas pas dans ce genre d’endroits. C’était assez crapuleux, l’Atelier des Môles, à l’ancienne ! Du grand n’importe quoi, on buvait du Banga au large, c’était épique ! Enfin voilà, c’est le premier concert dont je me souvienne qui compte ! 

 Premier concert que tu as apprécié ?  

C’était la fête de la musique à Montbéliard. Je devais avoir 16 ans… Ce jour là sur la scène des Halles, il y avait Two Tone Club, c’était ska, festif, et on avait pris une bonne baffe. On ne connaissait pas du tout. Ce sont des mecs qui ont trois-quatre ans de plus que nous. Mais à l’époque on ne se connaissait pas, même de vue, on est devenus potes avec après via Les Productions de l’Impossible. Je ne suis pas resté dans le ska, mais il fallait un début et j’ai pris une bonne baffe ! 

Bon il y a aussi eu les Hellbats, mais c’est pas pareil ! L’atelier des Môles fait aussi salle de répète et nos potes des Rebel Assholes - enfin à l’époque leur groupe de lycéens pré-pubères s’appelait les Chocky Meadow – passaient juste après les Hellbats qui étaient un peu plus âgés que nous. Je me rappelle d’un dimanche où on avait débarqué pour la répétition… On était comme des dingues ! Bon maintenant ça veut plus rien dire, mais quand t’es en 3ème et que tu traînes avec les mecs de 1ère… Tu vois le délire : "il a de la moustache, pas moi !". Bref, les Hellbats ça jouait déjà bien vénère à l’époque, y’avait Petra à la contrebasse. Très psychobilly, ça répétait bananes bien montées sur la tête, tatouage qui va bien, on était assez impressionnés de les voir jouer ! 

Premier groupe local qui t’a marqué ?  

Two Tone Club ! On revient à la première question mais voilà, c’était sur la fête de la musique qu’on pouvait vraiment festoyer. Sur Montbé, il ne se passait pas grand chose quand on était ados… Il y avait des concerts dans des patelins malsains mais on ne pouvait pas y aller parce qu’on n’avait pas le permis… En cafés-concert dans le coin, à part le Pinky Bar, c’était mort… 

Premier disque local qu'on t'a offert, que tu as acheté, piqué, emprunté, trouvé... ou autre ? 

Je ne sais pas si je peux me souvenir de ça. Sûrement Two Tone Club ou Hellbats. Après ça se mélange aussi avec la période où Chocky Meadow sortait ses premiers disques. Tu vois j’ai même ici un autocollant dégueulasse d’un truc de 1997-98 ! Ça enregistrait dans un cagibi avec deux micros Bontempi et on en faisait des CD’s qu’on vendait 1€ dans les concerts. Bref, tout ça doit faire partie des premiers que j’ai eu parce qu’on était encore à la cassette à l’époque. Et en cassettes, ça devait être pareil : des enregistrements des Rebel Assholes, j’en ai encore une pleine valise ! Mais ouais, Two Tone Club, Hellbats, les Rebel… C’était la même période. 

Le concert en région qui t’a le plus marqué ? 

Ah y’en a eu plusieurs de grosses baffes ! Datsuns au Cousty, il y a trois-quatre ans, je ne m’attendais pas du tout à ça : un groupe néo-zélandais qu’on avait fait jouer avec Hellbats et Jack and the Bearded Fishermen, une grosse soirée ! Je connaissais un peu la zic mais pas trop l’état d’esprit des mecs. Ils sont arrivés l’après-midi ultra à la cool, cheveux longs, pieds nus, ça répète en pattes d’eph’, ultra détendu… Et le soir, ça monte sur scène en slim-santiags. Les types se transforment : ça pue le shampooing ! Enfin c’était assez énorme ! 

Et un autre truc qui pue le shampooing que j’ai vu et qui m’a mis la grosse baffe (maintenant je ne suis plus très shampooing mais j’ai quand même une bonne base : j’étais fan des Guns étant gosse. C’est pas ce que j’écoute tous les jours, j’aime bien le hard mais voilà…) c’était Mother Superior aux Pdz. Un lundi soir, il y a quatre-cinq ans, ça jouait avec Hellbats. Je ne connaissais pas Mother Superior, juste de nom, comme ça. Comme j’habitais à 200 mètres, je n’avais aucune excuse pour ne pas aller voir au moins Hellbats. Il était 22h à la fin de leur concert et je me disais, "je fais quoi ? Je rentre regarder Cold Case ?". Finalement je suis resté et j’ai pris une grosse grosse baffe avec trois virtuoses qui font du gros hard rock, deux-trois ballades texanes, le cactus, la santiag ! J’ai fait le concert à 45 degrés arrière, une bonne calotte derrière la tête !

Une anecdote à partager ?

On organisait à l’Entrepôt à une époque, le local de Radio Bip, complètement à l’ancienne ! On était vénères, fallait préparer le pré-concert, le booking, les affiches, jusque là : normal. Par contre le jour même, fallait tout emmener : la scène, les lights, la sono, le bar, les boissons, tout ! Presque même la table pour les entrées tellement le lieu n’était pas adapté. Après le concert, fallait se taper le rangement, le ménage…Bref, ce soir là, grosse grosse soirée ! Je me demande si n’y avait pas Hawaii Samurai… À 23h il nous restait 20 bières dans le frigo alors qu’on écoulait environ 50 bières en 10 minutes et on s’est dit : "à 23h12 c’est l’émeute !". Le troisième groupe n’avait pas joué, il fallait qu’on trouve une solution. On est donc partis en Kangoo avec un pote. On est descendus rue Battant, on a ratissé deux turcs d’affilée ! Ils ont fait leur beurre ce soir là : "tu vois ton frigo de canettes ? Je veux tout !". Les mecs ont halluciné de nous voir vider leurs frigos dans des grands sacs poubelles ! On est revenus pile-poil, il devait rester deux bières. On avait de tout, même de la buckler sans alcool ! Bon après, en onze ans de concerts, on a des milliers d’anecdotes : on voit pas mal de choses…

Ton implication dans la scène locale ?

C’est assez dilué sur les années, juste sur un peu de temps libre de temps à autres, beaucoup de fun. Mais en tant que nouveau président de Mighty - avant j’étais le scribe - l’implication va forcément de soi : en onze ans, on a quand même organisé 300 concerts ! C’est beaucoup de temps bénévole, il faut le rappeler : on n’est pas payés. C’est uniquement pour la "cause" sans forcément attendre quoi que ce soit en retour.

Tu nous dirais quelques mots à propos de Mighty Worm ?

Officiellement déclarés en préfecture en mars 2003, on a organisé le premier concert le 25 octobre 2003 à l’Atelier des Môles, avec Taste like Chicken, Chocky Meadow et un groupe dont on ne parlera pas… On était cinq au début de l’asso : Mathieu, Olivier, Jérémy, Ben et moi. D’autres personnes ont gravité autour de Mighty en étant musiciens, mais le départ, c’était nous. 

Pour rentrer dans le détail, on peut juste dire que Mighty Worm a déjà organisé 300 concerts et fait jouer 200 groupes de 28 nationalités différentes. On a organisé des concerts dans toute la Franche Comté : du café-concert pourri jusqu’aux grandes salles comme la Rodia. Même à Vesoul ! À Besac on a connu tous les lieux : le Groonies, le Red House, les Pdz, la Crèmerie, le Bar de L’U, l’Entrepôt, le Cylindre, des trucs obscurs… La Rodia bien sûr, le Cylindre… C’est toujours dans des partenariats avec des structures ou des associations. On a même organisé des concerts avec des assos de Besac qui n’ont rien à voir avec le rock comme Uppertone ou le Citron Vert. Il y a pas mal de collaborations ici, on est un peu comme des cigales, on va dans les lieux qui nous accueillent : c’est pas toujours les mêmes, on change en fonction des possibilités. 

On a commencé quand on avait 20-22 ans, on était tous des jeunes cons mi-étudiants, mi-beatnik, mi-chômeurs : on n’en avait rien à foutre d’aller coller des affiches presque tous les jours. On avait la même activité qu’aujourd’hui, mais en plus compliquée. Maintenant on a le réseau, on a le public, l’expérience, donc on rame beaucoup moins. Au début, on passait un peu pour des idiots : on arrivait de Montbé, on écoutait du punk à roulette et les gens sur Besançon nous regardaient bizarrement : "C’est qui ces mecs avec des baggy shorts ? Rentrez chez vous !". Petit à petit, on a connu des gens et voilà. 

Après on a adapté les choses, certains ont bougé, d’autres ont pris le relais. C’est aussi une nouvelle ère : on a créé un emploi avec Ben et avoir un salarié, ça demande une certaine activité et d’être carré. Pendant les sept-huit premières années on a fonctionné sans subventions, en mode punk rock pirate "on a besoin de personne ! Do it yourself !". On n’a jamais accepté d’avoir des logos de banques sur nos affiches, c’était hors de question et ça l’est toujours. Ni même le moindre logo, à part ceux d’associations. Par contre, Vava (Eric) qui bossait à l’époque chez Découvert Autorisé - une asso qui aidait les autres assos à se structurer - nous a fait remarquer qu’on passait à côté de pas mal d’aides. On a donc un peu changé d’avis en faisant des demandes, notamment aux villes de Montbéliard et Besançon parce qu’on trouvait légitime de le faire. Mais on n’a jamais fait de dossiers de demandes à l’Europe où je ne sais quoi, on n’est pas très cerfa. 

On anime également depuis 2007 avec Ben le Mighty Worm Radio Show qui passe sur Radio Campus (102.04FM) et qui se retrouve également sur internet. Ca a lieu tous les mercredis - ou presque - de 19h à 21h.

Il y a aussi les Mighty Rocking Dj’s, on a commencé il y a un an et demi avec Butch, Nico et Ben, vu qu’on a tous des vinyles et qu’on se complète bien. C’est pour le fun de faire danser les gens. On explore aussi d’autres horizons, des trucs garage et sixties. Au début on passait des morceaux pour des anniversaires Mighty, des fins de soirée et puis on a commencé à faire danser 5, 10, puis 50 personnes : on s’est dit "putain ça marche !". J’ai eu le déclic en allant à une soirée soul sixties organisée par Les Productions de l’Impossible au Moloco où les gens étaient sapés avec les chemises à jabots et tout ! Même la déco était raccord, tu te croyais carrément dans les boums de lycées américains ! Il y avait 300 personnes sapées qui dansaient et je me suis dit que c’était ce qu’il fallait faire à Besac. 

C’est toujours dans cette idée de diffuser. Je ne suis pas musicien donc je transmets un truc qui me plaît : organiser des concerts, faire de la radio, faire les Dj’s. C’est le spirit du truc !

Qu’est ce que tu fous là ?

Parce que je vous connais ? Au delà de ça, parce que j’estime avoir le droit d’être dans ce cercle rapproché de gens : avec Mighty Worm, normal. J’ai quasiment fait toutes les affiches de Mighty, assisté à tous les concerts. Je pense être un des seuls de l’assoc’ à avoir tenu les rênes pendant onze ans. Certains, comme Ben, sont partis un temps à l’étranger. Jean Loose est maintenant sur Montbé, Eric pareil. Moi - avec d’autres, sans prendre le dessus hein – je suis resté là pour chapeauter un peu tout. C’est hors de question qu’il n’y ait que moi pour représenter Mighty Worm, ce ne serait pas du tout objectif. Mais effectivement, je pense avoir ma place dans le projet. 

Le mot de la fin ? 

Le cri de guerre, je l’ai : Rogez 2020 ! Allez, on pose officiellement la candidature de Benjamin Rogez, qui est donc "mon  salarié", pour Besançon 2020 ! C’est comme nos t-shirts "Not my Coach" ou "support your local kebab", ça vient d’une grosse connerie. On connaît tous du monde, mais Ben a le serrage de paluches facile. Pour la moitié des types à qui il serre la main ou qui l’abordent quand on va coller, il va te dire après : "je sais même pas qui c’est". Tout est parti de là, comme souvent un trip absurde qui tourne à la plaisanterie organisée! Vous savez désormais pour qui voter aux prochaines municipales, autant profiter de cette interview pour faire un peu de politique : ROGEZ 2020 ! "

Liens utiles pour comprendre de quoi on a parlé :



Des trucs qui passaient sur la platine de Lucas pendant qu'on papotait :